Dans une étude publiée dans la revue Cell le 19 septembre, une équipe internationale de recherche, dirigée par une scientifique du CNRS1 , dévoile les espèces animales qui seraient les plus susceptibles d’avoir servi d’hôtes intermédiaires du SARS-CoV-2, le virus responsable de la pandémie de COVID-19. Ces espèces étaient présentes à la fin 2019 sur le marché de Huanan à Wuhan (Chine), épicentre de la pandémie.
Grâce aux séquençages génétiques des échantillons prélevés sur les stands du marché après sa fermeture le 1er janvier 2020, les scientifiques ont mis en évidence la co-présence en ce lieu du matériel génétique du virus SARS-CoV-2 et de celui de certains animaux sauvages. Parmi les espèces identifiées figurent notamment les chiens viverrins et les civettes2 , deux espèces déjà impliquées dans l’émergence du SARS en 2002 et considérées comme facilitant le passage du virus aux humains.
Les échantillons avaient été séquencés grâce à une technique dite méta-transcriptomique3 , qui a permis à l’équipe de recherche d’identifier l'ensemble du matériel génétique des organismes présents dans chaque échantillon (qu’il s’agisse de virus, bactéries, plantes, animaux ou humains). L’analyse des données de séquençage a permis de caractériser le génotype des animaux présents sur le marché et de retracer leur origine géographique probable4 .
En parallèle, les scientifiques ont étudié les génomes viraux des premiers patients atteints de COVID-19 afin de retracer l’évolution possible du virus. Ils ont ainsi mis en évidence que la diversité génétique du virus présente dans le marché était représentative de la diversité génétique des cas humains précoces de la pandémie. Ce résultat, cohérent avec une origine au marché, s’ajoute à d’autres déjà existants comme la localisation des premiers cas à proximité du marché de Huanan.
Ainsi, l’ensemble de ces nouvelles informations va dans le sens de l’hypothèse selon laquelle la pandémie aurait été déclenchée par l’introduction d’animaux infectés sur le marché à la fin 2019.
L’étude révèle également la présence d’autres virus zoonotiques sur le marché, soulignant le risque élevé de nouvelles pandémies liées à la vente d’animaux vivants au sein de villes densément peuplées. Identifier les activités humaines les plus susceptibles de déclencher de nouvelles pandémies est en effet crucial pour mieux anticiper et prévenir ces crises sanitaires.
- Le laboratoire français concerné est l’Institut d’écologie et des sciences de l’environnement (CNRS/Sorbonne Université/UPEC/IRD/INRAE).
- Les chiens viverrins sont des canidés sauvages proches des renards avec des marques semblables à celles des ratons laveurs, et les civettes sont de petits mammifères carnivores proches des mangoustes et des hyènes. Le rat des bambous et le porc-épic de Malaisie ont également été trouvés dans des échantillons positifs pour le SARS-CoV-2
- L’étude repose sur l’analyse des données partagées par le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies (CCDC). Ces informations, accessibles sur des bases de données ouvertes et publiques, incluent les séquences brutes de plus de 800 échantillons collectés sur le marché de Huanan (sur des cages et chariots, les sols et murs des stands, ainsi que dans les canalisations et égouts).
- Par exemple, les chiens viverrins proviendraient du sud ou du centre de la Chine, et non du nord, là où sont généralement localisés les élevages pour la fourrure.