"Tant que tu vivras, cherche à t'instruire: ne présume pas que la vieillesse apporte avec elle la raison" Solon

Baleines échouées : les tempêtes solaires seraient responsables


Sur cette animation, on peut voir les deux éruptions solaires survenues le 6 septembre 2017
© Nasa, GSFC, SDO 


En 2019, plus de 200 baleines se sont échouées sur les plages du monde. Et de nouveaux travaux montrent aujourd'hui que les tempêtes solaires pourraient être partiellement responsables. Elles aveugleraient les baleines qui seraient alors incapables de s'orienter dans les mers.

Des baleines qui s'échouent sur les plages. Ce n'est malheureusement pas si rare. Les sonars les poussent-elles au suicide ? Ou est-ce la faute de baleines pilotes malades ? Ou encore le résultat d'un manque de nourriture lié à la pêche intensive ? Des chercheurs de l'université Duke (États-Unis) apportent aujourd'hui une preuve que les tempêtes solaires peuvent avoir leur part de responsabilité en aveuglant les baleines grises (Eschrichtius robustus) et en provoquant ainsi leur perte.

Rappelons que certaines espèces de baleines parcourent chaque année des milliers de kilomètres, des eaux chaudes aux eaux plus froides, pour mettre bas d'une part et pour se nourrir d'autre part. La baleine grise est de celles-ci. Et ses périples seraient guidés par les champs magnétiques. Ce qui expliquerait pourquoi les tempêtes solaires peuvent mener les baleines à s'échouer.

Les éruptions solaires seraient l’une des causes des échouages de baleines sur nos plages
© Markus, Adobe Stock 



Des baleines aveuglées par les tempêtes solaires

Pourtant, sur 186 échouages de baleines grises vivantes entre 1985 et 2018, pas de hausse des échouages les jours où les champs magnétiques étaient les plus perturbés. En revanche, celles-ci s'échouent deux fois plus fréquemment les jours où le nombre de taches solaires est élevé. Et plus de quatre fois plus lorsque les signaux radiofréquences qui nous arrivent du Soleil sont élevés.

Les chercheurs de l'université Duke en concluent que les tempêtes solaires perturbent les récepteurs magnétiques même des baleines. Ces dernières s'échouent non pas parce qu'elles reçoivent des informations de position erronées, mais parce qu'elles sont, en quelque sorte, aveuglées. Reste désormais à confirmer ces résultats sur d'autres espèces de baleines et en différents points du globe.

CE QU'IL FAUT RETENIR

Plus de 30 années de données indiquent aux chercheurs que les migrations des baleines grises pourraient être orientées par les champs magnétiques. Et ainsi se voir perturbées par les tempêtes solaires. Plus précisément par les signaux radio-fréquences émis à ces occasions.


Échouage de baleines : la cause serait... les tempêtes solaires

Si les cétacés s'échouent parfois en groupe, ce ne serait pas toujours à cause d'un « leader malade » ou des sonars militaires. La raison pourrait être céleste : cela serait aussi dû aux éruptions solaires. Explications.

Article de Jean-Luc Goudet paru le 17/09/2017


Dans la longue quête des causes d'échouages collectifs de cétacés, la dernière possibilité est sûrement la plus originale. Publiée dans la revue International Journal of Astrobiology, elle situe l'origine du phénomène dans le soleil et ses colères. L'hypothèse n'est, pour l'instant, étayée par aucune preuve, seulement basée sur de bons arguments de l'équipe allemande de l'université Christian-Albrecht de Kiel. Klaus Heinrich Vanselow et ses collègues ont étudié de près une série de 29 échouages de cachalots (Physeter macrocephalus), uniquement des mâles et surtout des jeunes, survenus en mer du Nord entre fin janvier et début février 2016 sur les côtes d'Allemagne, des Pays-Bas et du Royaume-Uni.

Venus de la mer de Norvège, ces cétacés faisant route vers l'ouest auraient dû rejoindre l'Atlantique nord. Au lieu de cela, ils ont viré sur leur gauche et sont venus buter sur les côtes européennes. Les chercheurs n'indiquent pas de coïncidence précise avec une forte tempête solaire (il y a bien eu une éjection de masse coronale le 10 janvier 2016) mais s'appuient surtout sur un précédent travail de Klaus Heinrich Vanselow et Klaus Ricklefs. Publié en 2005, celui-ci montrait une corrélation statistique de 1712 à 2003 entre l'activité solaire et les échouages de cachalots (voir le lien en bas de l'article).

Les anomalies magnétiques tromperaient les cétacés

Dans cette nouvelle publication, l'équipe revisite cette hypothèse à la lumière des échouages de 2016. En bombardant la Terre de particules chargées au niveau des hautes latitudes, les tempêtes solaires engendrent de belles aurores polaires mais aussi des anomalies magnétiques temporaires. Or, insistent les auteurs, les dimensions de ces anomalies sont du même ordre de grandeur - 50 à 100 kilomètres - que celles dues aux structures géologiques formant l'océan et leurs amplitudes sont voisines aussi. En un point donné, elles correspondent à un décalage apparent en latitude qui peut atteindre 460 km. Comme elles durent environ une journée (un délai durant lequel les cachalots parcourent en moyenne 100 km), ces anomalies magnétiques peuvent être une cause d'erreurs de navigation.

Le fait que les individus échoués soient tous des mâles est logique car les femelles ne viennent pas, comme eux, s'alimenter dans les hautes latitudes. En revanche, il n'y a aucune raison pour qu'il y ait surtout des jeunes. C'est que, avancent les chercheurs, ils n'ont pas encore l'habitude de ces régions et de ces bizarreries fluctuantes de leur paysage magnétique.

Bien sûr, tout cela est spéculatif. Le sens du magnétisme chez les cachalots reste une hypothèse, de même que leur utilisation d'une topographie magnétique, qui leur permettrait de reconnaître les lieux où ils se trouvent. L'idée, cependant, est plausible. À la Nasa, Antti Pulkkinen, spécialiste de la physique du soleil, a monté une équipe pour étudier de plus près la corrélation entre les tempêtes solaires et les échouages de cétacés. On en saura sans doute plus d'ici quelque temps. Et peut-être bientôt puisque ce mois-ci est survenue une très forte éruption solaire...